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Asie et le choc des cultures

Asie et le choc des cultures

Le choc, le tsunami

Super, super, je venais juste d’être papa d’une très jolie petite fille, une petite eurasienne au teint de perle. Ma maman allait venir la découvrir et évidemment s’extasier devant cette merveille dont j’étais l’heureux et fier créateur.

Paré de ses plus beaux atours « bébé » attendait de pied ferme sa vénérable aïeule. Tout était fin prêt, le cœur battant nous entendîmes la porte de la chambre grincer sur ses gonds, le moment tant- attendu nous figea et le temps fut soudain suspendu aux lèvres de ma mère. Elle se pencha au dessus du berceau, sourit, ses yeux brillèrent de bonheur et soudain, dans un rictus de contentement, elle nous asséna : « comme elle est moche ! ».

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Les bras ballants, l’air ahuri toute l’assistance en resta pantoise, ne sachant quoi répliquer, paralysée par cette inattendue et si sévère sentence.

L’esprit encore assommé, je décidai manu- militari de demander à ma pauvre mère si elle n’était pas sous l’effet de médicaments ou d’anti- dépresseurs puissants mais peu efficaces. Soudain, les yeux brillants, elle se mit à bredouiller la voix pleine d’émotion : « elle est vraiment très, très moche ! ». Je capitulai , je rendis les armes, la bataille était par trop inégale, je n’avais pas la force de me battre contre ma propre mère.

Tiraillé par le doute, l’amour -propre en berne, je décidai d’assiéger le domicile de ma maman et ainsi connaître les tenants et les aboutissants de cette saugrenue mascarade qui avait transformé un père au summum de fierté en un malheureux crapaud géniteur d’un tétard femelle. Un sourire bienveillant au coin des lèvres, elle me prit la main, jeta autour d’elle un regard suspicieux et me glissa dans un soupir : « ta fille est la plus belle du monde ». Je sentis soudain le paroxysme de l’incompréhension brouiller mon entendement.

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La réponse

Enfin tout devint limpide quand l’une de mes amies, d’origine asiatique, m’expliqua que les parents vietnamiens, de peur de représailles perpétrées par les « esprits », ne claironnaient jamais que leurs enfants étaient magnifiques. La jalousie rendait nos « ectoplasmes aux yeux bridés » fort irritables et parfois même méchants. Selon les dires ancestraux, il arrivait que ces derniers vengent des enfants qu’ils trouvaient trop beaux. La meilleure parade à ces fourbes et basses attaques était la cachotterie. Dans certaines provinces, il était de coutume de noircir le visage des nouveau- nés afin que les fantômes ne les remarquassent point. En Asie, il ne faut jamais que les esprits errants prennent ombrage des bébés et qu’ils se vengent de n’être eux- même que des êtres transparents et sans consistance !

Bref pour conclure en Europe le dicton qui pourrait le mieux traduire l’essence même de cette histoire serait : « vivons heureux, vivons cachés ! ».

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A Propos de l'auteur

Alexandra De Forcille

Alexandra De Forcille

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