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  • VIETNAM OU COUP DE FOUDRE EN INDOCHINE

    VIETNAM OU COUP DE FOUDRE EN INDOCHINE

    RENCONTRES COLONIALES OU LES HISTOIRES VRAIES D’ASIE (VIETNAM)

    Coup de foudre en Indochine

     VIETNAM OU COUP DE FOUDRE EN INDOCHINE

    Vietnam juillet 1947, le Nord s’embrase, le Sud s’amuse. Hanoï ne veut plus d’un passé de soumission et lève l’étendard d’une liberté si longtemps enfouie. Des idées nouvelles, un désir d’indépendance, un vent nouveau souffle sur le Tonkin et l’ombre d’un avenir sombre embrase la quiétude tranquille des rizières.

    Saigon, l’insouciante, se perd dans les jeux, s’enivre de fêtes lascives, s’oublie dans la lumière des néons chatoyants. Elle a beau s’étourdir, elle sait que le destin d’un pays la rattrapera bientôt, alors elle exulte dans des frasques démesurées et se laisse mourir de plaisir.

    En ce 14 juillet 1947 alors que les évènements se précisent dans le Nord, dans le Sud un grand bal des débutantes se prépare au le palais présidentiel. Le chef de l’état a invité de très nombreux convives à participer à cette soirée de prestige qui fait rêver toutes les jeunes filles du Vietnam. Elles sont là les sœurs Hô , elle font partie de la fête, ébahies d’être ici dans cette magnifique résidence. Le monde entier leur tend les bras, la terre entière est à genoux devant leurs délicates silhouettes à peine sorties de l’adolescence, elles sont les reines d’un monde qui va s’enfoncer dans une tragédie interminable et douloureuse. Au diable la guerre, rien ne compte plus pour elles que les paillettes et le strass des robes qui scintillent sous la lumière indiscrète des projecteurs.

    Ils sont tous là, généraux aux uniformes rutilants, coloniaux aux costumes impeccables, diplomates à l’allure empruntée, jeunes hommes au regard de braise, belles plantes exotiques prêtes à dévorer les mâles trop peu méfiants, ce sont les derniers représentants d’un monde déjà oublié, un monde en sursis.

    Leur père les présente à son ami, un certain Monsieur Messmer et, manu militari, les invite à aller s’amuser car des affaires fort importantes l’attendent.

    Elle s’appelle Simone et ses sœurs ont pour nom Yvonne, Marguerite et Cécile et viennent du Nord. Elles sont vietnamiennes mais de nationalité française, cette particularité les sauvera plus tard d’une lente descente aux enfers.

    Happées par la musique langoureuse distillée par un orchestre en smoking blanc, elles s’égaient toutes comme des moineaux affolés, éperdues de bonheur, émerveillées, gargarisées par ce luxe exacerbé offert sans pudeur par cette immense salle de réception.

    Le service de sécurité est là tendu, à fleur de peau, l’oeil aux aguets, prêt à intervenir au moindre mouvement de foule, au simple battement de cils, suspectant même leurs propres collègues car aujourd’hui les frontières sont floues, le futur incertain et les amis peu sûrs.

    Paul est le responsable de cette garde rapprochée, il observe les aller- venues de chaque convive, son œil aguerri plonge dans le regard des invités pour en extirper l’essence et ainsi anticiper tout danger. Soudain ce professionnel aux yeux bridés, cet Elliot Ness au cœur de pierre, reste figé devant ce tableau si fragile d’une jeune fille timide et maladroite. Il est là comme tétanisé, seul enfermé dans un silence de glace parmi tous ces gens qui tournoient, s’esclaffent, mangent et boivent.

    Alors Paul, il faut te réveiller, tu n’as pas le droit de rêver, retombe sur terre, ici tous comptent sur toi. Rien n’y fait, subjugué par la belle Simone, il oublie tous ses devoirs, confie à son adjoint la bonne marche des opérations, se défait de ses habits de fonction et revêt un costume valorisant, car monsieur veut plaire, séduire, jouer les fanfarons et assiéger le cœur de la jeune fille drapée dans un magnifique Ao-Aï bordeaux. Il sait à cet instant précis qu’elle sera la femme, la femme de sa vie.

    Paul, fin stratège, invite tantôt Yvonne, tantôt Marguerite à des danses endiablées et ne jette aucun regard à Simone qui de surcroît n’en a cure…. D’ailleurs elle n’a même pas remarqué ce garçon follement amoureux qui virevolte avec ses sœurs. Le voilà faisant le beau, il parle haut et fort, se trémousse comme un gardon pris à l’hameçon, le ridicule ne peut rien contre l’amour.

    Paul est fort courtisé par la gente féminine, son charme a déjà fait de nombreux ravages et dévasté de nombreux cœurs de Saïgonnaises. Son père est un homme que tous connaissent, respectent et il est d’ailleurs extrêmement fortuné, puissant et de surcroît un bienfaiteur de l’église.

    Le papa de Simone connaît d’ailleurs bien celui de Paul, ils se fréquentent et s’apprécient.

    Paul, le tombeur de ces dames, a sorti les grands moyens et rien ne pourra arrêter cette machine à broyer le cœur de Simone, ni l’indifférence, ni l’échec et encore moins le ridicule. L’affaire s’annonce difficile car les prétendants sont nombreux et la victoire difficile. Le regard de velours ne suffira pas à capturer, à ensorceler cette jeune fille qui ne pense aujourd’hui qu’à s’amuser au rythme des danses et des rires.

    Pas de répit pour Paul car le lendemain il part à la recherche de sa belle et trouve l’adresse où celle- ci habite. Il passe et repasse devant cette maison aux couleurs de l’amour ; il n’ose pas s’arrêter, hésite, se tâte… Yvonne et Marguerite ont remarqué son manège et l’invite à venir prendre une petite collation que ce dernier accepte avec empressement. Enfin la première défense est franchie et Paul rêve déjà d’une victoire totale où Simone béate tomberait dans ses bras comme un fruit mûr prêt à être cueilli.

    Il pavoise dans cet aéropage de la gente féminine et ne veux plus partir, il s’incruste et même s’invite à dîner. L’on envoie un « boy » à Cholon, le quartier chinois de Saigon, afin de commander un canard laqué, plat uniquement réservé aux convives de choix. Paul tel un pacha en « Pachaterie » se félicite de cette si « inattendue » invitation mais malheureusement une épreuve des plus épouvantables l’attend. Notre séducteur déteste le canard et ce met si délicat le dégoûte au plus haut point, ingérer cette volaille palmée est une torture à sacrifier sur l’autel de l’amour. Paul ne cède pas et prenant son courage à 2 mains avale courageusement le canard qui lui est présenté et dans un rictus des plus hypocrite, remercie la maîtresse de maison d’une si délicate attention.

    Les heures passent, et l’encombrant convive ne se décide toujours pas à regagner ses pénates, il s’évertue à camper près de sa belle qui le trouve aussi collant que du riz gluant.

    Comment se débarrasser de cet amoureux transit qui, de peur de se faire coiffer au poteau par un autre prétendant, ne veut plus quitter des yeux sa « future épouse non consentante ».

    Il est fort tard et voilà qu’il virevolte, fait de l’esprit ne remarquant aucunement les baillements à peine dissimulés de toute la maisonnée. Une telle opiniâtreté amuse et même séduit les sœurs qui ne savent toujours pas pour laquelle cet « ‘énergumène » s’évertue à stationner, sans la moindre gêne chez elles. Etant donné l’heure tardive, la maman propose à Paul de dormir sur place dans la seule pièce disponible celle où réside leur animal de compagnie le « cochon ». N’écoutant que son courage Paul n’hésite pas un instant à accepter de partager son sommeil avec cet animal réputé pour sa propreté légendaire et son ronflement peu délicat.

    Les jours passent et Paul reste sur place, aveugle à la gêne occasionnée, planté tel un chêne indéracinable aux racines tentaculaires ; le cochon est devenu un ami intime, un vrai pote de chambrée à qui il confie son espoir de conquérir le cœur de Simone.

    Comprenant qu’il est impossible de se débarrasser d’un tel phénomène, la famille entière déstabilisée, dérangée mais aussi intriguée attend avec impatience le dénouement, le départ de cette bernique, non bretonne, aux yeux bridés.

    Une vraie histoire sans lendemain dont l’héroïne, l’exotique Simone, en voiture Simone, ne semble pas encore remarquer le manège de Paul dont l’incroyable audace a déjà « tsunamisé » une famille entière.

    Les jours passent et « Mister glue » ne trépasse toujours pas. Vous vous demandez comment cette abracadabrante histoire peut se terminer ?! Et bien rassurez vous car l’étalon italien, oh pardon, vietnamien, se maria avec Simone dans la cathédrale de Saigon soulageant sa future belle- famille d’un si long siège dont l’issue paraissait vraiment improbable.

    Qu’est devenu le cochon, fut-il invité à la cérémonie, se laissa t-il glisser vers une dépression d’avoir perdu son co- locataire ? Mais ceci est une autre histoire que je vous conterai plus tard , bien plus tard !

    Henri (l’un des enfants du couple)

    Cette histoire est une histoire vraie d’Asie.

    Photo à la une de Thierry Beyne

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    Autres histoires vraies d’Asie

  • Histoires vraies

    Histoires vraies

     

    HISTOIRES VRAIES

    En queue de poisson

    (Laaura Tasumer)

    J’ai 13 ans et je suis invitée à ma première surprise party. Et ceci est une histoires vraies

    Sensible à notre explosion de joie, la mère de ma meilleure amie m’invite à passer la nuit et me propose de  partager le déjeuner familial du lendemain. Femme de diplomate, la maîtresse de maison, trop souvent confrontée aux protocoles des dîners officiels, se fait une joie de congédier le personnel pour le week-end, d’emprunter le tablier de la cuisinière et de se transformer en mère de famille ordinaire. Notre enthousiasme et notre jeunesse dynamisent cette australienne de 50 ans, aussi petite et ronde que sa fille est grande et svelte. Seuls, leurs visages parsemés de taches de rousseur, la blondeur de leurs cheveux et leurs regards d’un bleu azuré marquent leur filiation.

    Levée tôt, tirant son caddie derrière elle, elle se fond dans la foule du marché de l’avenue du Président Wilson. Bien que malmené par les gens, son corps exprime l’allégresse jusqu’aux quelques mèches de cheveux rebelles qui s’échappent de son chignon apprêté. En nage, ses joues sont rouge écarlate et légèrement perlées de gouttes de sueur quand elle pousse la porte de l’appartement… D’un œil satisfait, elle étale avec soin ses achats sur la table et se met au travail.

    crevettes

    Afin de dresser le couvert, elle ouvre l’imposante armoire normande de l’office et s’interroge devant l’empilement de nappes amidonnées : Quel sera le motif le plus élégant pour dresser une tablée digne de jeunes filles comblées de leurs premiers baisers ? Une nappe gracieusement fleurie de quelques roses aux tons légers met en valeur un service gris pâle finement perlé. Les verres à pieds transparents de couleurs vives rehaussent la tonalité des fleurs… Des serviettes en papier orange, parme et anis contrastent et rajeunissent le raffinement du décor.

    Réveillées un peu tard, notre petit déjeuner n’est séparé du déjeuner que par la nécessité d’une douche rapide et d’un habillement hâtif afin de respecter les horaires de repas imposés par le maître de maison… Peu bavard, cet homme de taille moyenne, dont la calvitie centrale s’entoure de quelques cheveux rares et grisonnants, est la plupart du temps assis à son bureau chargé de dossiers ou élégamment installé dans son fauteuil club de couleur fauve, caché derrière un journal de langue anglaise. Vêtu quel que soit le jour de la semaine d’un costume trois pièces d’alpaga gris anthracite, il semble oublier sa présence parmi nous. L’iris très foncé de ses yeux, amplifié par l’effet loupe des verres de ses lunettes, se pose rarement sur son entourage. J’avoue que le personnage m’impressionne…

     

    avocat

    L’heure du déjeuner a sonné et la maîtresse de maison, aussi excitée que je suis surprise par cette ambiance familiale si différente de la mienne, s’empresse de placer ses hôtes… Le visage de son mari s’éclaire et je capte un regard bienveillant accompagné d’un début de sourire. Mon amie, d’un geste de la main chasse ses longs cheveux, rougit et salue son père. La petite sœur, de 2 ans notre cadette, ne cache pas sa jalousie et exprime vivement son indignation : pour quelle raison n’a-t-elle pas pu, elle aussi, sortir la veille ?

    Je souris maladroitement, ne sachant sur quel pied danser face à la légère tension que je crois déceler. Un grand plat, porté tel un trophée à bout de bras par la mère et posé victorieusement sur la table déclenche des applaudissements. Les avocats garnis de grosses crevettes roses à la sauce cocktail émoustillent directement mes papilles et je sens avec horreur une pointe de salive humidifier la commissure de mes lèvres. La poitrine de la mère déjà prépondérante se gonfle de bonheur devant nos mines réjouies et affamées. Cérémonieusement, elle m’octroie deux moitiés d’avocats avant de servir les autres…

    J’adore les avocats, les crevettes et la sauce cocktail et malgré moi je ne peux m’empêcher de laisser échapper quelques gloussements évocateurs. Au lieu de s’offusquer de ces manifestations bruyantes, la mère me regarde avec bienveillance, touchée par ma sincère admiration pour ses dons culinaires. Réconfortée par sa béate compréhension, je décide de mettre des mots sur l’extase que connaît mon palais. 

    Je la regarde droit dans les yeux et m’exclame :

    –  Madame, mad….

    Le ton est crescendo et son visage s’empourpre en même temps que le mien. Emue, je lance dans un dernier souffle :

    – Madame, madame c’est vraiment, vraiment, vraiment DEGUEULASSE !

    Il m’arrive et je ne sais hélas absolument pas pourquoi, tant le sens est loin de lapsus révélateurs et totalement incongru, de dire exactement le contraire de ce que je pense … Par exemple «  j’ai chaud » alors que je tremble de froid, « bonjour monsieur » alors que la personne est manifestement une dame. Jamais encore, cet étrange problème d’emploi de vocabulaire contraire ne m’avait surpris dans ce type de situation !

     

    Aujourd’hui encore, j’entends ma voix claire profaner ce déjeuner. La tristesse de la scène qui accompagna le silence pesant qui s’ensuivit ainsi que la honte cuisante qui s’empara de moi me brûlent encore. La vision de mon adorable hôtesse, statufiée, la bouche bloquée en position cul de poule respirant tel un poisson dans un bocal, ses grosses joues virant du pourpre au violet, ses mains jointes en prière devant les autres convives médusés, leurs cuillères vides ou pleines stoppées en pleine course, reste un cauchemar… Blême, les oreilles encore pleines de l’écho de mes paroles, pétrifiée sur ma chaise, je sentais que toute tentative d’excuses de ma part ne ferait qu’amplifier le désastre causé par ma pathologie du contraire.

    Comment expliquer à une femme adorable que vous venez d’anéantir,  que vous étiez à mille lieux de penser que votre syndrome du contraire vous jouerait ce tour là ?  Essayez de l’informer que vous souffrez d’un mal étrange et inconnu pour lequel aucun praticien n’a jamais été formé ! Que pour votre plus grande honte, pas plus tard que la veille, vous avez encore pour la énième fois, salué d’un « bonjour madame » votre voisin chéri, un  vieux monsieur, ex ambassadeur de Syrie, que vous admirez et aimez comme le grand-père que vous n’avez jamais connu !

    J’ai bafouillé sans conviction :

    – Je voulais dire, vraiment excellent..

    J’aurais aimé partir en courant. Un sourire crispé a élargi le rond formé par la bouche de mon hôtesse. Le père a posé sa cuillère. Mon amie et sa sœur ont posé sur moi un regard plein d’interrogation. Le reste du déjeuner eut des allures d’enterrement …

    Je suis partie aussi vite que la bienséance m’y autorisait…

    HISTOIRES VRAIES

  • Histoires vraies: Vaudeville à la Morgue

    Histoires vraies: Vaudeville à la Morgue

     

    Histoires vraies: Vaudeville à la Morgue 

     

    rire

    Ma chère belle mère, Solange (mère de ma femme) décédée en 2002 se trouvait déjà à la morgue de l’hôpital avant que sa sœur Huguette, ne se déplaçant qu’en fauteuil roulant, puisse venir lui rendre hommage. Leur relation était très fusionnelle, elles se vouaient une vraie passion l’une pour l’autre.

    Ma femme et moi obtenons une dérogation pour venir avec elle, à titre très exceptionnel et ce, dans la plus grande discrétion,  afin de lui rendre une dernière visite dans ce lieu si sympathique.

    Deux jeunes infirmières stagiaires, dont cela n’était pas du tout la fonction, nous accueillent à la morgue, dans les sous-sols de l’hôpital. Elles ouvrent un grand casier qui contient trois corps et extirpent ma belle mère du casier du milieu. Elles positionnent les roulettes, font glisser le chariot en inox sur lequel repose la défunte et nous autorisent à rester quinze minutes à la contempler ainsi pour ne pas que le corps se réchauffe trop à la chaleur ambiante. Puis elles s’éclipsent.

    Trop contents de pouvoir satisfaire la demande d’Huguette, je la laisse parler à Solange :

    – Ah, ma Solange, ma Solange, nous avons vécu tellement de choses ensemble. Rodolphe, tu vois comme elle est belle. Je veux l’embrasser pour un dernier adieu. Je veux t’embrasser ma Solange.

    J’approche son fauteuil roulant. Elle essaie de se pencher mais ça reste encore trop loin pour qu’elle puisse accomplir son souhait. Alors elle se lève, prend appui avec ses deux mains sur le chariot en inox dont les stagiaires n’avaient pas serré le frein, et, devant subitement tant de poids mal réparti, le chariot en inox valdingue par terre avec grand fracas, emportant dans son élan le corps de la malheureuse Solange stoppé net dans sa chute par le carrelage froid de la morgue.

    Evidemment, panique à bord. Ma femme, la fille de la défunte, se met à hurler dans le couloir. Les deux stagiaires arrivent à la rescousse. La première entre et, en voyant le tableau pitoyable, tombe directement dans les pommes.

    Bon, bon, c’est bien parti la visite en catimini !

    –  Ma Solange, je t’ai tuée ! Ma Solange, je t’ai tuée une deuxième fois !  hurlait sa sœur Huguette, éberluée et choquée. Il faut dire qu’on le serait à moins !

    La  deuxième stagiaire se met à trembler comme une feuille en voyant le cadavre étendu parrire terre :

    – Qu’est-ce qui se passe, qu’est-ce qui se passe ?

    Je ne réponds pas et décide de prendre les opérations en main. Pour commencer, j’assène quatre claques à la première stagiaire pour qu’elle se remette de ses émotions et  nous aide à remettre le corps sur le chariot. Une fois debout, nos huit bras ne sont pas de trop pour ramasser la pauvre Solange et la positionner  à nouveau correctement avant de la glisser dans son casier.

    A ce moment-là, on voit le cadavre d’une vieille dame, placée dans le casier du bas, dont l’œil était resté ouvert  et qui semblait contempler notre pathétique scénario.

    Les infirmières, livides et prêtes à nouveau à défaillir, imaginent aussi les conséquences pour elles, au cas où nous aurions porté plainte auprès de l’hôpital pour personnel incompétent.

    Je  les rassure :

    – Ne vous inquiétez pas, ça va bien se passer, il n’y aura pas de suite, personne n’a rien vu !

    Et nous repartons sur le champ à toute allure dans les couloirs des sous-sols puis du rez-de-chaussée de l’hôpital, en poussant le fauteuil roulant d’Huguette qui, toujours sous le choc, continue à hurler à qui veut bien l’entendre :

    – J’ai tué ma sœur, j’ai tué ma sœur une deuxième fois !

    Une visite comme on nous l’avait demandée : en toute discrétion…

    (Serge Senftlé)

    Une autre histoire vraie

     

  • Asie et le choc des cultures

    Asie et le choc des cultures

    Asie et le choc des cultures

    Le choc, le tsunami

    Super, super, je venais juste d’être papa d’une très jolie petite fille, une petite eurasienne au teint de perle. Ma maman allait venir la découvrir et évidemment s’extasier devant cette merveille dont j’étais l’heureux et fier créateur.

    Paré de ses plus beaux atours « bébé » attendait de pied ferme sa vénérable aïeule. Tout était fin prêt, le cœur battant nous entendîmes la porte de la chambre grincer sur ses gonds, le moment tant- attendu nous figea et le temps fut soudain suspendu aux lèvres de ma mère. Elle se pencha au dessus du berceau, sourit, ses yeux brillèrent de bonheur et soudain, dans un rictus de contentement, elle nous asséna : « comme elle est moche ! ».

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    Les bras ballants, l’air ahuri toute l’assistance en resta pantoise, ne sachant quoi répliquer, paralysée par cette inattendue et si sévère sentence.

    L’esprit encore assommé, je décidai manu- militari de demander à ma pauvre mère si elle n’était pas sous l’effet de médicaments ou d’anti- dépresseurs puissants mais peu efficaces. Soudain, les yeux brillants, elle se mit à bredouiller la voix pleine d’émotion : « elle est vraiment très, très moche ! ». Je capitulai , je rendis les armes, la bataille était par trop inégale, je n’avais pas la force de me battre contre ma propre mère.

    Tiraillé par le doute, l’amour -propre en berne, je décidai d’assiéger le domicile de ma maman et ainsi connaître les tenants et les aboutissants de cette saugrenue mascarade qui avait transformé un père au summum de fierté en un malheureux crapaud géniteur d’un tétard femelle. Un sourire bienveillant au coin des lèvres, elle me prit la main, jeta autour d’elle un regard suspicieux et me glissa dans un soupir : « ta fille est la plus belle du monde ». Je sentis soudain le paroxysme de l’incompréhension brouiller mon entendement.

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    La réponse

    Enfin tout devint limpide quand l’une de mes amies, d’origine asiatique, m’expliqua que les parents vietnamiens, de peur de représailles perpétrées par les « esprits », ne claironnaient jamais que leurs enfants étaient magnifiques. La jalousie rendait nos « ectoplasmes aux yeux bridés » fort irritables et parfois même méchants. Selon les dires ancestraux, il arrivait que ces derniers vengent des enfants qu’ils trouvaient trop beaux. La meilleure parade à ces fourbes et basses attaques était la cachotterie. Dans certaines provinces, il était de coutume de noircir le visage des nouveau- nés afin que les fantômes ne les remarquassent point. En Asie, il ne faut jamais que les esprits errants prennent ombrage des bébés et qu’ils se vengent de n’être eux- même que des êtres transparents et sans consistance !

    Bref pour conclure en Europe le dicton qui pourrait le mieux traduire l’essence même de cette histoire serait : « vivons heureux, vivons cachés ! ».

    D’autres histoires vraies

     

  • Rencontres coloniales ou les histoires vraies d’Asie (Vietnam) .

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    Coup de foudre en Indochine

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    Vietnam juillet 1947, le Nord s’embrase, le Sud s’amuse. Hanoï ne veut plus d’un passé de soumission et lève l’étendard d’une liberté si longtemps enfouie. Des idées nouvelles, un désir d’indépendance, un vent nouveau souffle sur le Tonkin et l’ombre d’un avenir sombre embrase la quiétude tranquille des rizières.

    Saigon, l’insouciante, se perd dans les jeux, s’enivre de fêtes lascives, s’oublie dans la lumière des néons chatoyants. Elle a beau s’étourdir, elle sait que le destin d’un pays la rattrapera bientôt, alors elle exulte dans des frasques démesurées et se laisse mourir de plaisir.

    En ce 14 juillet 1947 alors que les évènements se précisent dans le Nord, dans le Sud un grand bal des débutantes se prépare au le palais présidentiel. Le chef de l’état a invité de très nombreux convives à participer à cette soirée de prestige qui fait rêver toutes les jeunes filles du Vietnam. Elles sont là les sœurs Hô , elle font partie de la fête, ébahies d’être ici dans cette magnifique résidence. Le monde entier leur tend les bras, la terre entière est à genoux devant leurs délicates silhouettes à peine sorties de l’adolescence, elles sont les reines d’un monde qui va s’enfoncer dans une tragédie interminable et douloureuse. Au diable la guerre, rien ne compte plus pour elles que les paillettes et le strass des robes qui scintillent sous la lumière indiscrète des projecteurs.

    Ils sont tous là, généraux aux uniformes rutilants, coloniaux aux costumes impeccables, diplomates à l’allure empruntée, jeunes hommes au regard de braise, belles plantes exotiques prêtes à dévorer les mâles trop peu méfiants, ce sont les derniers représentants d’un monde déjà oublié, un monde en sursis.

    Leur père les présente à son ami, un certain Monsieur Messmer et, manu militari, les invite à aller s’amuser car des affaires fort importantes l’attendent.

    Elle s’appelle Simone et ses sœurs ont pour nom Yvonne, Marguerite et Cécile et viennent du Nord. Elles sont vietnamiennes mais de nationalité française, cette particularité les sauvera plus tard d’une lente descente aux enfers.

    Happées par la musique langoureuse distillée par un orchestre en smoking blanc, elles s’égaient toutes comme des moineaux affolés, éperdues de bonheur, émerveillées, gargarisées par ce luxe exacerbé offert sans pudeur par cette immense salle de réception.

    Le service de sécurité est là tendu, à fleur de peau, l’oeil aux aguets, prêt à intervenir au moindre mouvement de foule, au simple battement de cils, suspectant même leurs propres collègues car aujourd’hui les frontières sont floues, le futur incertain et les amis peu sûrs.

    Paul est le responsable de cette garde rapprochée, il observe les aller- venues de chaque convive, son œil aguerri plonge dans le regard des invités pour en extirper l’essence et ainsi anticiper tout danger. Soudain ce professionnel aux yeux bridés, cet Elliot Ness au cœur de pierre, reste figé devant ce tableau si fragile d’une jeune fille timide et maladroite. Il est là comme tétanisé, seul enfermé dans un silence de glace parmi tous ces gens qui tournoient, s’esclaffent, mangent et boivent.

    Alors Paul, il faut te réveiller, tu n’as pas le droit de rêver, retombe sur terre, ici tous comptent sur toi. Rien n’y fait, subjugué par la belle Simone, il oublie tous ses devoirs, confie à son adjoint la bonne marche des opérations, se défait de ses habits de fonction et revêt un costume valorisant, car monsieur veut plaire, séduire, jouer les fanfarons et assiéger le cœur de la jeune fille drapée dans un magnifique Ao-Aï bordeaux. Il sait à cet instant précis qu’elle sera la femme, la femme de sa vie.

    Paul, fin stratège, invite tantôt Yvonne, tantôt Marguerite à des danses endiablées et ne jette aucun regard à Simone qui de surcroît n’en a cure…. D’ailleurs elle n’a même pas remarqué ce garçon follement amoureux qui virevolte avec ses sœurs. Le voilà faisant le beau, il parle haut et fort, se trémousse comme un gardon pris à l’hameçon, le ridicule ne peut rien contre l’amour.

    Paul est fort courtisé par la gente féminine, son charme a déjà fait de nombreux ravages et dévasté de nombreux cœurs de Saïgonnaises. Son père est un homme que tous connaissent, respectent et il est d’ailleurs extrêmement fortuné, puissant et de surcroît un bienfaiteur de l’église.

    Le papa de Simone connaît d’ailleurs bien celui de Paul, ils se fréquentent et s’apprécient.

    Paul, le tombeur de ces dames, a sorti les grands moyens et rien ne pourra arrêter cette machine à broyer le cœur de Simone, ni l’indifférence, ni l’échec et encore moins le ridicule. L’affaire s’annonce difficile car les prétendants sont nombreux et la victoire difficile. Le regard de velours ne suffira pas à capturer, à ensorceler cette jeune fille qui ne pense aujourd’hui qu’à s’amuser au rythme des danses et des rires.

    Pas de répit pour Paul car le lendemain il part à la recherche de sa belle et trouve l’adresse où celle- ci habite. Il passe et repasse devant cette maison aux couleurs de l’amour ; il n’ose pas s’arrêter, hésite, se tâte… Yvonne et Marguerite ont remarqué son manège et l’invite à venir prendre une petite collation que ce dernier accepte avec empressement. Enfin la première défense est franchie et Paul rêve déjà d’une victoire totale où Simone béate tomberait dans ses bras comme un fruit mûr prêt à être cueilli.

    Il pavoise dans cet aéropage de la gente féminine et ne veux plus partir, il s’incruste et même s’invite à dîner. L’on envoie un « boy » à Cholon, le quartier chinois de Saigon, afin de commander un canard laqué, plat uniquement réservé aux convives de choix. Paul tel un pacha en « Pachaterie » se félicite de cette si « inattendue » invitation mais malheureusement une épreuve des plus épouvantables l’attend. Notre séducteur déteste le canard et ce met si délicat le dégoûte au plus haut point, ingérer cette volaille palmée est une torture à sacrifier sur l’autel de l’amour. Paul ne cède pas et prenant son courage à 2 mains avale courageusement le canard qui lui est présenté et dans un rictus des plus hypocrite, remercie la maîtresse de maison d’une si délicate attention.

    Les heures passent, et l’encombrant convive ne se décide toujours pas à regagner ses pénates, il s’évertue à camper près de sa belle qui le trouve aussi collant que du riz gluant.

    Comment se débarrasser de cet amoureux transit qui, de peur de se faire coiffer au poteau par un autre prétendant, ne veut plus quitter des yeux sa « future épouse non consentante ».

    Il est fort tard et voilà qu’il virevolte, fait de l’esprit ne remarquant aucunement les baillements à peine dissimulés de toute la maisonnée. Une telle opiniâtreté amuse et même séduit les sœurs qui ne savent toujours pas pour laquelle cet « ‘énergumène » s’évertue à stationner, sans la moindre gêne chez elles. Etant donné l’heure tardive, la maman propose à Paul de dormir sur place dans la seule pièce disponible celle où réside leur animal de compagnie le « cochon ». N’écoutant que son courage Paul n’hésite pas un instant à accepter de partager son sommeil avec cet animal réputé pour sa propreté légendaire et son ronflement peu délicat.

    Les jours passent et Paul reste sur place, aveugle à la gêne occasionnée, planté tel un chêne indéracinable aux racines tentaculaires ; le cochon est devenu un ami intime, un vrai pote de chambrée à qui il confie son espoir de conquérir le cœur de Simone.

    Comprenant qu’il est impossible de se débarrasser d’un tel phénomène, la famille entière déstabilisée, dérangée mais aussi intriguée attend avec impatience le dénouement, le départ de cette bernique, non bretonne, aux yeux bridés.

    Une vraie histoire sans lendemain dont l’héroïne, l’exotique Simone, en voiture Simone, ne semble pas encore remarquer le manège de Paul dont l’incroyable audace a déjà « tsunamisé » une famille entière.

    Les jours passent et « Mister glue » ne trépasse toujours pas. Vous vous demandez comment cette abracadabrante histoire peut se terminer ?! Et bien rassurez vous car l’étalon italien, oh pardon, vietnamien, se maria avec Simone dans la cathédrale de Saigon soulageant sa future belle- famille d’un si long siège dont l’issue paraissait vraiment improbable.

    Qu’est devenu le cochon, fut-il invité à la cérémonie, se laissa t-il glisser vers une dépression d’avoir perdu son co- locataire ? Mais ceci est une autre histoire que je vous conterai plus tard , bien plus tard !

    Henri (l’un des enfants du couple)

    Cette histoire est une histoire vraie d’Asie.

    Photo à la une de Thierry Beyne

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    Autres histoires vraies d’Asie

  • Histoires vraies: les figues

    Histoires vraies: les figues

    Histoires vraies

     

    Les figues

    (Agnès Vassiliu)

    figues

     

    Je retrouve en Crète mon amie anglaise Caroline, qui connaît bien cette île  grecque et m’incite à venir l’y rejoindre en vacances.

    Parmi les différentes excursions qu’elle me propose, nous partons un jour en car visiter un petit endroit dont j’ai maintenant oublié le nom. Trente minutes après, nous y sommes. Et là, émerveillement du lieu et notamment d’un magnifique figuier dont les fruits sont juteux à point. Je dois, je l’avoue, avoir ingurgité plus d’une douzaine de figues, sachant pertinemment que je n’en retrouverai pas d’aussi bonnes de si tôt.  La balade suit son cours et l’heure de retour nous invite à reprendre le car  en sens inverse.

    Nous arrivons à trouver deux places assises malgré le monde et cinq minutes après le démarrage de ces trente minutes de voyage, un mal de ventre me prend, de celui qui ne supporte pas d’attendre une visite sur un trône, quel qu’il soit ! Il n’en existe pas dans le car et n’écoutant que mon courage, je fonce voir le chauffeur en lui demandant de s’arrêter car je dois descendre pour « barbouillements ». Tout ça en gestuel bien sûr, car je ne parle pas grec et il ne parle pas anglais ni français.

    Le chauffeur prend les choses en main et me dit d’aller m’asseoir, ce que je fais, attendant la suite du programme, que j’espère instantanée. Il me fait porter un sac spécial « si vous avez mal au cœur, lâchez-vous !».

    Horreur ! Il ne s’agit pas de cet orifice là et ça ne répond pas du tout à ma demande… Retour vers le chauffeur, mimes en tout genre pour descendre vite fait. Y’a urgence ! Il finit par supposer ma peine, arrête le car et m’ouvre la porte en grand.

    Enfin comprise et presque guillerette, je descends à toute vitesse pour m’apercevoir, à ma grande stupeur, que nous sommes en rase campagne et qu’il n’y a rien alentour pour se réfugier, ne serait-ce qu’un minimum ! L’arrière du car ne me semble pas convenir vu le passage de voitures trop proche et me voilà dodelinant de la tête, à droite, à gauche pour aller vivre ce grand moment de solitude qui m’attendait ! Oui, mais où ?

    Je finis par repérer un pauvre arbuste en plein champ, dont le tronc n’est pas plus épais qu’un avant-bras ! Pas le choix, il faut faire vite car la catastrophe s’annonce imminente ! Je cours les trente mètres qui séparent mon arbuste du car. Pas le temps de tourner autour pour savoir quelle serait la meilleure position et me voilà accroupie derrière (autant dire devant, c’est pareil vu l’épaisseur du tronc !) en train d’engager sans peine une fonction première bien connue de chacun devant mon car blindé de monde et donc de paire d’yeux inconnus. Ils étaient tous là !

    Je leur ai offert un show gratuit et en direct qui m’a valu, à mon retour dans le car, ces dizaines de paires d’yeux amusés  et de fous rires retenus en guise de comité d’accueil. Autant dire que je me suis jetée sur le premier journal grand format venu (quitte, même, à  le lire à l’envers) pour me faire oublier et disparaître de la vue de chacun !

    Une autre histoire vraie

    Ceci est une histoire vraie, à vous de nous raconter vos péripéties!!!

     

     

     

     

     

  • Histoires vraies

    Histoires vraies

     

    Père Noël en grosse caisse

    (Jacques Ferenbach)

     

     

    Des histoires vraies, des aventures vécues enfin une petite vraie part de la vie qui vous est servie sur un plateau.

    Notre petite troupe de clowns donne un spectacle dans l’Aube pour les fêtes de fin d’année 2008. L’organisateur nous demande si nous jouons  aussi le rôle du père Noël. Nous lui répondons que nous avons le costume mais que généralement, c’est plutôt quelqu’un du comité des fêtes qui s’en charge. Au dernier moment, l’organisateur finit par trouver celui qui se laisse tenter par le rôle, à qui nous prêtons donc notre costume. Superbe salle, beau théâtre, le spectacle débute, tout se passe bien, les enfants s’amusent beaupere-noel-imagecoup avec notre show, dans lequel figure un numéro avec nos chiens sur scène.

    On me demande ensuite d’accueillir et de présenter le père Noël. Alors, toujours habillé en clown, avec mon saxophone je commence à plonger le public dans l’ambiance et fais chanter « Petit Papa Noël » à toute la salle. Des fumigènes et un magnifique décor féerique valorisent, en prime, l’arrivée tant attendue de ce personnage hors du commun. On voit enfin apparaître le Père Noël qui, prenant son rôle à cœur, marche avec prestance dignement et tranquillement depuis le fond de scène vers l’avant.

    Manque de chance, avec les fumigènes, il n’a pas vu la fosse d’orchestre d’un mètre cinquante de profondeur et, avançant un pas de trop, s’écroule dedans pour atterrir dans la grosse caisse de la batterie et les pupitres encore présents au fond.

    images-gratuites-pere-noel

    Le public assiste au triste spectacle et tout le monde se met à hurler dans la salle. Toujours habillé en clown sur scène,  je ne trouve rien d’autre à crier, sur le coup, que :

    – Il est mort ! Le Père Noël est mort, il ne bouge plus !

    On ne peut pas dire que ça détende l’atmosphère ! Panique à bord, les secours arrivent, installent un rideau de protection tout autour et constatent, finalement, qu’il n’est pas mort. Ouf ! L’hôpital est contacté.

     

    Mais dans un tel moment, comment reprendre ses esprits et dire à l’organisateur que notre troupe doit vite repartir pour ne pas être en retard car nous avons un autre contrat trois heures plus tard à deux cent cinquante kilomètres de là ? Et surtout comment expliquer ce détail pratique pour nous mais bien futile, compte tenu de la situation, qui consiste à récupérer illico  l’indispensable costume, gentiment prêté !

    Alors, débute un déploiement de diplomatie pour arriver à nos fins :

    –  Le Père Noël a trop chaud, il faut lui enlever la barbe et la perruque.

    Mission accomplie, ça, c’est fait ! Mais pour le costume, on est encore loin du compte !

    – Vite la ceinture, ça va le serrer !

    Troisième accessoire récupéré ! Pour retirer ensuite le manteau de quelqu’un qui a la jambe en vrac, ça n’est pas simple et pourtant le temps nous presse. Une autre municipalité a financé notre spectacle et un autre jeune public nous attend cet après-midi pour fêter Noël : nous ne voulons pas les décevoir.

    Mais le Père Noël, en fort mauvaise posture, hurle toujours à chaque fois qu’on le touche. On est bien obligé de constater qu’on n’a pas tous les mêmes problèmes au même moment : c’est le moins que l’on puisse dire. Alors on retente un cruel :

    –  Il a trop chaud, il faut lui enlever le manteau !

    Au fur et à mesure, on finit par lui relever le costume qui passe des chevilles aux genoux, puis des hanches à la poitrine. Il nous faudra ensuite beaucoup de patience pour l’en extraire totalement. On y arrive in-extremis et, il faut bien l’avouer, on charge tout notre matériel au pas de course, tels des voleurs, pour repartir vers une nouvelle ambiance, qu’on espère plus sereine et plus festive.

    Comme quoi, même Père Noël, c’est un métier pour lequel il y a des répétitions indispensables  car il faut savoir reconnaître les vraies cheminées des fosses !

    Des histoires vraies comme tous nos personnages plein de vie et de bonheur.

    Si vous avez des histoires sympathiques à nous raconter, n’hésitez pas à nous les envoyer.